26e dimanche du temps ordinaire A – 27 septembre 2020
Ez 18, 25-28 – Ps 24 – Ph 2, 1-11 – Mt 21, 28-32
Homélie du P. Franck Gacogne.
« Va ranger ta chambre… ». « S’il te plaît, est-ce que tu peux mettre le couvert… ». Objectivement vues les réponses que vous obtenez souvent de vos enfants ou de vos petits-enfants, il semble que cela ne leur plaise pas beaucoup ! Mais parfois aussi, vous constatez que malgré tout le service est rendu, et personnellement je suis témoin dans le sacrement de la réconciliation que très souvent le regret et le désir de mieux faire sont bien présent.
Quand on évoque l’histoire d’un père avec ses deux fils, tout le monde pense à la magnifique parabole dans l’évangile de Luc au chapitre 15, elle est unique dans les 4 évangiles. Mais cette histoire, moins connue que l’on vient d’entendre elle aussi est unique, mais cette fois-ci dans l’évangile de Matthieu, pourtant, on la connait moins bien. Là aussi il est question d’un père et de ses deux fils, là aussi il est question d’une parole qui blesse puis d’un remord qui conduit au changement, à une conversion.
Je pense que cette histoire est très proche de celle de dimanche dernier, vous savez, ces ouvriers de la dernière heure qui reçoivent autant que ceux qui ont répondu oui très tôt. Dimanche dernier comme aujourd’hui, c’est une invitation à aller travailler à la vigne, mais il y a 8 jours, les derniers appelés n’avaient pas eu l’occasion de dire « non » avant, c’est bien plutôt qu’ils n’avaient pas été appelés en début de journée. Ici la parabole va encore plus loin, car pour le fils qui a commencé par refuser l’appel de son père, il est dit qu’il a finalement fait la volonté du Père. Comment comprendre ce paradoxe ?
La chronologie de l’histoire est je crois très importante : ce n’est pas parce que le premier a refusé que le père se tourne alors vers le second fils pour lui demander d’y aller à sa place. Non, regardons bien le texte, le premier, revient sur son refus et décide finalement d’y aller, et ceci, avant que le père ne fasse cette même demande au second fils. Cela signifie que la place de l’un n’est pas prise par l’autre, que les places ne sont pas limitées, que l’espace pour aller travailler à la vigne de Dieu est large et offert à tous : toute femme, tout homme est invité, a répondre à l’amour du père. Et Jésus n’est pas offusqué qu’on lui réponde « non ». Il porte ce regard d’espérance sur chacun. Il sait chacun capable d’un geste, tôt ou tard, qui réponde ou manifeste l’amour que lui-même est venu vivre avec tous.
Dans cette parabole, Jésus s’adresse spécialement aux chefs des prêtres et aux anciens. Le reproche qu’il leur adresse est double, non seulement parce que drapés de leurs savoirs et de leur dignité ils ne se sont pas senti concerné par l’appel à la conversion de Jean-Baptiste, mais en plus parce que dans un second temps, ils ne se sont pas laissés touchés par celles et ceux qui eux y répondait ; sans doute par mépris, parce que ce sont à leur yeux des personnes infréquentables : prostituées et collecteurs d’impôt.
Ceci peut nous interroger et questionner notre paroisse. Y-a-t-il dans notre quartier, dans notre immeuble des personnes que nous avons du mal à aborder, à fréquenter, dont nous verrions par exemple d’un mauvais œil leur présence parmi nous ? La Parole de Dieu leur serait-elle aussi destinée ? Souvent, quand même nous sommes capables de manifester soutien et solidarité envers bien des personnes vivant toute forme de précarité, et c’est heureux qu’il en soit ainsi. Mais cette paroisse, la Bonne Nouvelle, l’évangile leur sont-ils aussi accessibles ? Et qui d’autre qu’une paroisse en aurait les clés et la responsabilité ? Dans son exhortation « la joie de l’évangile », le pape François nous dit que : « La pire discrimination dont souffrent les pauvres est le manque d’attention spirituelle. L’immense majorité des pauvres a une ouverture particulière à la foi ; ils ont besoin de Dieu et nous ne pouvons pas négliger de leur offrir son amitié, sa bénédiction, sa Parole, la célébration des Sacrements et la proposition d’un chemin de croissance et de maturation dans la foi. »
Voilà pourquoi j’aime une paroisse, quand elle réussit à rassembler des personnes très diverses par l’âge, par l’origine culturelle ou sociale, parce que tout ce qui contribue à cette diversité et à cette mixité va dans le sens de l’Evangile, constitue le peuple de Dieu tel qu’il le désire et devient image de son Royaume. Alors, je vous encourage, à ce que notre paroisse, par les initiatives de chacun d’entre nous puisse continuer ce qu’elle fait déjà je crois assez bien : savoir accueillir et réunir dans une même communauté toutes celles et ceux qui désirent répondre oui à l’appel de Dieu pour ensemble grandir dans la foi. Amen.