Dimanche de Pentecôte B – 23 mai 2021
Ac 2, 1-11 – Ps 103 (104) – Ga 5,16-25 – Jn 15, 26-27 ; 16, 12-15
Homélie du P. Franck Gacogne
Le jour de la Pentecôte, je crois que beaucoup de chrétiens sortent des églises en se disant : « Nous venons de prier l’Esprit Saint, c’est bien beau, mais moi, je suis bien incapable de dire ce que cela signifie ». Et chaque année, la même question se repose. Alors, si on s’interrogeait aujourd’hui sur l’Esprit-Saint ? De quoi s’agit-il, ou plutôt, de qui s’agit-il, que fait-il ?
Ce que nous apprenons c’est que depuis le jour de la Pentecôte, Dieu n’a pas d’autre façon d’être présent à nous que par son Esprit. Quand nous communions au Corps et au Sang du Christ, Jésus est réellement présent au pain et au vin, mais il y est présent par son Esprit, c’est d’ailleurs la prière que nous dirons tout à l’heure : « Père, nous t’en prions, envoie ton Esprit-Saint afin qu’il sanctifie nos offrandes », la présence réelle est spirituelle. Eh bien pour les apôtres, c’est aussi ce qu’il se passe : Jésus n’est plus avec eux, mais il leur donne son Esprit : le livre des Actes des Apôtres nous dit que c’est comme un feu (tel un sentiment amoureux, il rend le cœur ardent, tout brulant), que c’est comme un vent violent (on ne le voit pas, mais ça décoiffe, en voilier, il peut nous emmener très loin). Là où de l’amour est donné ou reçu, là où de la solidarité est vécu, quand nos cœurs sont touchés et réchauffés par ce que nous voyons, par des paroles ou des gestes qui prennent soin, qui sont humblement au service… alors je crois que l’Esprit-Saint est présent. Là où nous sentons une force qui nous pousse vers les autres pour accueillir, respecter et aimer alors l’Esprit-Saint, Dieu lui-même est présent. St Paul le dit dans la lettre aux Galates que nous avons entendue : « voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi. »
Etre chrétien par le baptême, par la confirmation, c’est recevoir d’une façon démesurée cet Esprit de Dieu, c’est pourquoi nous nous réjouissons ce matin pour les neuf nouveaux confirmés de notre paroisse. La question la plus importante que tous les chrétiens doivent se poser est celle du psaume « Comment rendrai-je au Seigneur tout le bien qu’il m’a fait ? » (Ps 115, 12). Être chrétien, c’est reconnaître ce que nous avons-reçu du Seigneur et c’est surtout choisir ensuite par toute sa vie la manière singulière dont nous allons accomplir et mettre en œuvre ce don de Dieu reçu.
L’Esprit de Dieu est insaisissable comme le souffle du vent, comme la source entre nos doigts, Dieu ne veut pas se laisser capturer, et lui-même ne se réserve pas qu’à son Eglise. L’Esprit de Dieu, on ne se rend compte de son passage qu’après coup, aux effets qu’il a produit en nous. Quand nous pouvons nous dire : cette rencontre, ce rassemblement, c’était un temps fort, cela m’a touché. Cette célébration, cette Parole m’a donné envie de redécouvrir l’évangile… alors c’est que l’Esprit est à l’œuvre : il est de tous les commencements mais on ne le découvre qu’au terme. Il est là dès le début mais on n’en prend conscience qu’à la fin.
Le jour de la Pentecôte, c’est aussi une fête de tous les peuples. Au temps de Jésus pour cette fête juive, des juifs de tout pays convergeaient à Jérusalem pour se rappeler l’Alliance au Sinaï entre Dieu et Israël. Et c’est précisément cette occasion qui est donnée aux disciples de sortir de la maison où ils s’étaient barricadés, où ils étaient terrés par la peur depuis la mort de Jésus malgré ses visites. Les voilà tout à coup rendus capables par l’Esprit reçu, de témoigner des merveilles de Dieu. Mais surtout, ils sont capables de le faire dans d’autres langues, de sorte qu’ils peuvent être entendu et compris par la diversité des peuples qui étaient présents à Jérusalem. Il y a comme une explosion du langage qui permet à la Bonne nouvelle du Ressuscité d’être accessible à tous, signe de l’universalité de la mission des Apôtres et de la nôtre.
Pentecôte, c’est le surgissement, c’est la naissance de l’Eglise, mais en y englobant toute la diversité humaine répandue à travers le monde. Une Eglise aux mille visages. A la Pentecôte, l’Eglise naît d’une façon vraiment universelle, c’est-à-dire qu’elle ne peut jamais se réduire à la situation ou aux préoccupations d’une communauté précise, ou même de tout un pays. Pentecôte, c’est la force et l’audace donné à chacun pour désirer traverser les frontières géographiques mais aussi culturelles, ou tout simplement les barrières qu’on érige devant soi par peur de la rencontre, ou par crainte de la différence.
Je crois que tout homme quel qu’il soit, que chacun de nous ici porte l’Esprit, et qu’il est donc à la fois en capacité de me donner quelque chose de lui, et de recevoir quelque chose de moi. Seule celle complémentarité peut construire l’unité. Il n’y a que l’échange qui respecte, qui honore l’autre et moi-même. Mets Seigneur en chacun de nous cet unique désir. Amen.