10e dimanche du temps ordinaire B – 9 juin 2024
Gn 3, 9-15 – Ps 129 (130) – 2 Co 4, 13 – 5, 1 – Mc 3, 20-35
Homélie de Franck Gacogne
Avez-vous compris l’évangile ? Moi, à la première lecture, rien du tout ! Puis, à force de le relire, cela s’est un peu éclaircie, alors je le résumerais ainsi : quand on veut se débarrasser de son chien, c’est bien connu, on déclare qu’il a la rage. Eh bien là, ce sont les scribes qui veulent se débarrasser de Jésus, alors ils le déclarent possédé par Satan. Sauf que les œuvres de Jésus plaident en sa faveur, car Satan ne peut que diviser et faire du mal alors qu’au contraire tout le monde constate que les œuvres de Jésus unissent, apaisent et rendent libre ceux qui mettent leur foi en lui. Mettre sa foi en Jésus… chers enfants en recevant ce matin l’Eucharistie, c’est ce que vous faites. Que veut donc dire mettre sa foi en Jésus ?
Parfois on entend des personnes dire « j’ai la foi ! », d’autres : « j’ai perdu la foi » ou encore cette question « Et toi, est-ce que tu as la foi ? » comme si « la foi » était le dernier iphone à la mode ! Comme si la foi était un objet bien déterminé que je pourrais posséder, acheter ou même me faire voler !
Alors j’ai repéré 4 bonne nouvelles. La première, c’est que la foi ne s’achète pas. Pas seulement parce qu’elle est introuvable en magasin, mais surtout en raison de sa valeur inestimable. C’est pourquoi Dieu a décidé qu’elle soit offerte, donnée gracieusement, c’est-à-dire gratuitement, par amour. Et ceci, pour que personne ne puisse être empêché d’y avoir accès. Et pourtant peu de personnes semblent vouloir s’y intéresser. Une seule chose est requise : il faut être libre pour être croyant, il faut le consentir, être en recherche, avoir soif de sens. Mais bien souvent, alors que ce bien le plus précieux qu’est la foi est gratuit, nous sommes esclave sans nous en rendre compte, de pleins d’objets qui en plus nous coûte très cher !
2ème bonne nouvelle : si la foi n’est pas un objet, elle est plutôt un espace, un environnement pour vivre notre quotidien. Etre croyant, c’est entrer dans la 4ème dimension ! Oui, je n’invente rien : vendredi dernier, St Paul dans sa lettre aux Ephésiens disait qu’être enraciné dans la foi, c’était vivre une quatrième dimension de notre espace de vie : après la largeur, la longueur et la hauteur, St Paul parle de la profondeur, la profondeur de l’amour du Christ. La foi, c’est choisir de vivre de l’amour du Christ qui grandi en moi quand j’entretiens mon amitié avec lui dans la prière, dans l’écoute de sa Parole par l’évangile, dans les sacrements. Vivre de la foi, c’est faire rayonner cette quatrième dimension dans toutes mes relations, en particulier vers ceux qui sont mal aimés ou en précarités. Vous savez, l’amour de Dieu c’est la seule chose qui augmente en soi au fur et à mesure qu’on le donne : plus je donne de l’amour authentique, moins il m’en manque. Alors qu’au contraire, l’amour de Dieu rétrécie en moi et devient fade si je m’en crois propriétaire et si je le garde jalousement.
3ème bonne nouvelle : la foi, je n’ai pas besoin de l’inventer. Etre croyant, ce n’est pas faire son marché spirituel et, selon l’humeur du moment, aller piocher dans telle ou telle tradition religieuse ce qui me convient. Non, en Jésus-Christ, tout nous a déjà été révélé, c’est la réponse de Pierre à Jésus : « vers qui irions-nous, tu as les paroles de la vie éternelle » (Jn 6, 68). L’Eglise n’est pas un système, une institution extérieure à moi dans laquelle je serais contraint de rentrer pour y être formaté. Non, l’Eglise nécessite d’être aussi variée que l’humanité pour être universelle, pour être vraiment l’Eglise du Christ. Et donc ma participation à sa vie n’est pas simplement souhaitable, mais elle est absolument nécessaire. J’aimerais que tous les baptisés qui ne sont pas ici sachent qu’ils manquent à l’Eglise. La foi nous a été transmise par l’Eglise, nous l’avons reçue. En revanche, sa mise en œuvre, dans nos familles, dans toutes les composantes de notre vie, elle est et elle sera ce que j’en ferais.
4ème bonne nouvelle, la foi, ce n’est pas l’évidence, la certitude, mais c’est plutôt le doute surmonté. Je ne peux pas dire « j’ai la foi », mais je peux dire « Je crois, je désire croire, j’essaye de croire »… et la raison en est claire : c’est l’Autre, c’est Dieu qui seul sait si je crois réellement en lui ! Croire n’est pas un savoir. S’il nous est demandé de croire en Dieu, c’est parce qu’il n’est pas évident que Dieu soit ! Croire ne fige pas Dieu dans l’idée que j’ai de Lui, mais le respecte et le transcende. Quand on dit « je crois », on déclare une confiance, foi et confiance viennent du même mot : on se fie à quelqu’un. Dans ce « je crois » que nous dirons tout à l’heure, nous n’énonçons pas une opinion volatile et changeante, mais nous disons la force d’un engagement et d’une adhésion dans un acte de confiance. « Je crois en Dieu ». Cela veut dire : je lui fais confiance pour me conduire au bonheur pour nous conduire à « la vie éternelle », puisque c’est le dernier mot du Credo. Dire « je crois en Dieu », c’est dire ma joie de m’engager en Eglise à suivre le Christ et l’Evangile et la manifester avec tous ceux qui me sont donnés à aimer. Amen.