Jeudi Saint C – 14 avril 2022
Ex 12, 1-8.11-14 – Ps 115 (116) – 1 Co 11, 23-26 – Jn 13, 1-15
Homélie du Fr. Tuan Nguyen (a.a)
Frères et sœurs,
Nous célébrons ce soir le dernier repas de Jésus avec ses amis. Ce qui doit nous impressionner le plus, c’est sans doute ce geste singulier de Jésus au cours du repas avec ses disciples. Le lavement des pieds…La force de la liturgie est peut-être en ceci : elle nous permet de nous représenter ce que Jésus a vécu avec eux. Se représenter, c’est se rendre présent à la scène.
« Jésus se lève de table, dépose son vêtement et prend un linge dont il se ceint. Il verse ensuite l’eau dans une bassine et commence à laver les pieds des disciples ».
Ce geste de Jésus semble extraordinaire pour nous aujourd’hui. Cependant, il ne l’est pas pour autant au temps de Jésus. L’hospitalité le demande : l’accueil d’Abraham envers trois passagers ( Gn 18,4), ou bien on lave les pieds des frères de Joseph lorsqu’ils sont arrivé en Egypte (Gn 48). Quand même, ce geste est souvent réalisé par les serviteurs et les esclaves. Et alors Jésus choisit ce geste.
Lavement des pieds, geste d’amour et de service envers le prochain.
Ce soir Jésus commande les préparatifs du repas, il est le maître du repas. Il est Maître du groupe. Il s’abaisse pour laver les pieds de ses disciples, ce qui embarrasse plus d’un, le cas de Pierre. L’évangéliste Jean introduit cette parole avant de laver les pieds des disciples : « Il les aima jusqu’au bout ». La beauté du geste est non seulement dans cet abaissement de Jésus, mais surtout il le fait par amour pour ses amis. Cet abaissement manifeste cette attitude intérieure de Jésus : aimer ses disciples. C’est un geste d’amour que Jésus veut que ses disciples le fassent les uns pour les autres. En même temps, Jésus voulait livrer un message fondamental à ceux qui veulent le suivre : « Vous m’appelez Maître et Seigneur, si je vous ai lavé les pieds, vous devez vous aussi laver les pieds des uns aux autres ; car c’est un exemple que je vous ai donné, ce que j’ai fait pour vous, vous aussi, faites-le-vous aussi ». Ce geste d’amour du Maître doit aider les disciples à devenir comme Lui. Ils sont invités à reproduire dans leur propre vie les uns envers les autres. En effet, lavement des pieds pour Jésus n’est pas quelque chose de symbolique, mais il est devenu sans doute le marqueur des chrétiens. Le service mutuel devient ce par quoi on reconnaît les disciples du Christ.
Lavement des pieds, un geste qui désigne une invitation : avoir part à la vie de Jésus
Jésus vient devant Pierre qui refuse d’abord d’être lavé par le Maître. Jésus dit qu’il ne peut comprendre ce geste : « Ce que je veux faire maintenant tu ne le sais pas maintenant, plus tard, tu comprendras ». Une énigme ? Jésus lui dit : « si tu ne te lave pas, tu n’auras pas de part avec moi » ? Cette promesse provoque chez Pierre l’envie d’être lavé non seulement les pieds, mais la tête, les mains ». Quelle est cette part avec Jésus ? Le contexte dans lequel a lieu ce geste, juste avant la Pâques juive autoriserait à envisager le rapport entre le geste de Jésus et l’évènement du passage de la Mer rouge du peuple d’Israël jadis. Jésus voudrait faire participer Pierre et ses disciples à son passage pour prendre part à sa vie nouvelle, la vie que le Père lui donne dans sa Pâque. Le rite du lavement des pieds semble révéler quelque chose du baptême. Par le baptême, les disciples de Jésus deviennent participants de sa vie après sa résurrection. Comme saint Paul écrit aux Colossiens : « vous êtes passés par la mort, et votre vie reste cachée avec le Christ en Dieu. Quand paraîtra le Christ, votre vie, alors vous aussi, vous paraîtrez avec Lui dans la gloire » (Col, 3,3-4).
Frères et sœurs,
Deux choses que Jésus a laissés pour faire mémoire de Lui. Si l’Eucharistie est le lieu où il se rend présent, si par ce « sacrement de l’amour », par lequel Jésus « continue de nous aimer jusqu’au bout, jusqu’au don de son corps et de son sang » (Benoît XVI, Sacramentum caritatis, 2011), par le lavement des pieds, le service du prochain, Jésus nous montre que nous pouvons devenir signe d’amour de Dieu, comme Lui, envers tous, en particulier les plus petits.