
3ème dimanche de Carême – 23 mars 2025
Ex 3, 1-8a.10.13-15 – Ps 102 (103)1-2, 3-4, 6-7, 8.11 – 1 Co 10, 1-6.10-12 – Lc 13, 1-9
Homélie de frère Tuan Nguyen.
En ce 3e dimanche de Carême, les catéchumènes font le rite dit du scrutin, dernière étape avant le baptême à la Veillé pascale. Le mot scrutin vous fait penser de prime abord au vote… en fait, le scrutin vient du scruter, regarder, examiner en soi, sous le regard de Dieu, se laisser regarder par Lui pour voir où j’en suis sur mon cheminement : « Tu me scrute Seigneur, et tu sais…Vois si je prends le chemin des idoles, conduis-moi sur le chemin de l’éternité » (Psaume 138, 1.24). Avec eux, nous aussi, nous sommes invités à scruter notre homme intérieur, pour voir si nous marchons sur la bonne voie, car comme disait sait Augustin, « vaut mieux boiter sur le chemin que de courir en dehors du chemin ».
Conversion au Dieu de miséricorde
L’évangile du jour dans saint Luc invite à la conversion. Deux drames rapportés à Jésus : Certains galiléens ont été massacrés par Pilate et la chute de la tour de Siloé ont tué des gens. Le premier évènement était humain, l’autre était un accident, sans doute. Dans la mentalité des gens, peut-être qu’encore aujourd’hui, devant les malheurs, on cherche d’où cela peut venir. Est-ce de la faute des victimes ? Ou on s’imagine aussi que cela est un châtiment divin ? La réponse de Jésus est claire : vous croyez que ces gens-là sont plus fautifs que les autres ? Pas du tout, dit Jésus. Tout homme est égal devant Dieu. Jésus poursuit, « si vous ne vous convertissez pas, vous périrez ». Cette parole peut surprendre… Le premier enseignement de Jésus : ce n’est pas la faute des gens que les malheurs leur tombent dessus. Jésus emmène ses auditeurs à aller plus loin. Il leur parle de l’urgence de conversion. De quelle conversion ? Ici il s’adresse à ceux qui l’écoutent, les juifs de son temps. Une première conversion ne serait pas d’abord chercher pourquoi ces gens-là ont subi un tel sort. Il s’agirait de changer le regard sur Dieu ? La première lecture du livre de l’exode raconte la rencontre entre Moïse et Dieu. Il révèle que Dieu est celui qui avait la compassion envers son peuple en Égypte, il voulait le faire sortir de la servitude. Il envoie Moise pour le faire. Dieu donne son nom à Moïse : Je suis Celui qui est ! autrement dit Il est ce qui est Présent. Dieu de Moïse est le Dieu plein de miséricorde. Il l’est toujours. Contrairement à ce Dieu plein de miséricorde, la parabole du figuier stérile nous semble donner une autre image sur Dieu. Un Dieu menaçant ?
Dieu menaçant ?
La parabole que Jésus raconte semble dire un peu cela. Mais, d’abord, c’est une parabole que Jésus raconte ; Là, nous touchons à un point sensible. La parole de Dieu se sert des expériences humaines pour nous décrire un peu ce qui est en Dieu.
Cette parabole s’adresse d’abord à tout un peuple. Le figuier ici représente Israël. Dieu attend une vie féconde de son peuple, mais son peuple ne l’écoute pas, s’éloigne de Lui. Il faut se convertir, dit Jésus, cela revient à se tourner vers Dieu et accueillir son Don : Jésus par excellence. Dans l’évangile de saint Luc, accueillir la présence de Jésus comme don de Dieu est une grande question. Dès le début : Jésus a été annoncé comme signe de contradiction. Croire ou refus de croire. Malgré des signes que Jésus a faits, peu de ses contemporains de Jésus croient en lui. Dans ce passage de ce dimanche et la suite, il est question du salut d’Israël, comme peuple de Dieu. Ce peuple de Dieu est en danger : ne pas croire en le signe que Dieu envoie, il est sur une pente qui descend…
Les mots : « coupe-le » résonne apparemment comme une menace. Jésus emploie le même langage que des prophètes. Entendons par là qu’il ne faut pas continuer dans la direction qui va dans le mur. Si Jésus se sert de ce langage, c’est pour dire que, Dieu de miséricorde ne saurait tolérer, ni laisser partir ceux qu’il aime vers un danger et un échec.
Puis, dans cette histoire du figuier, un détail mérite notre attention. Le vigneron supplie le propriétaire de patienter, pour qu’il prenne soin du figuier. Ce vigneron fait il allusion au Christ ? Il espère toujours dans un mieux, il croit en capacité de tout un collectif, de chacun de changer son cœur. Il est la miséricorde de Dieu en personne. Jésus nous dit quel est le visage de Dieu : il est miséricorde. Cela, saint Luc ne cesse de le montrer à travers son évangile (en particulier le chapitre 15).
Ce que Jésus voudrait nous dire, c’est que, Dieu patiente, il prend à cœur notre destin, notre bonheur. La patience est le synonyme de la miséricorde.
A l’appel de Jésus, convertissons-nous. Cela commence non pas d’abord par un regard sur notre moralité, mais par ce mouvement qui consiste à nous tourner vers le Dieu de miséricorde, changer notre regard sur Dieu. La conversion consiste aussi à accueillir le Christ, don de Dieu. Touché par nos malheurs et nos souffrances, il vient pour nous faire traverser. Il est cette présence d’un Dieu qui nous dit que : Je suis avec vous. Lui dont le nom est : Je suis celui qui est, il est au présent mais à l’avenir… Puisse ce temps de Carême creuse en nous ce désir de Dieu, de suivre le Christ. Amen.