22e dimanche du temps ordinaire C – 28 août 2022
Si 3, 17-18.20.28-29 – Ps 67 (68) – He 12, 18-19.22-24a – Lc 14, 1.7-14
Homélie du P. Franck Gacogne
Cherchons-nous le bonheur ? Voulons-nous vraiment être heureux ? Cette question parait insolite, car il nous semble bien évident à tous que chacun dans la vie cherche à être heureux, non ? Seulement voilà, si je pose cette question, c’est parce que nous faisons tout l’inverse : nous ne choisissons pas l’endroit et les circonstances dans lesquelles Jésus nous garantit le bonheur. Et une fois encore pour l’expliquer, Jésus nous place dans les moments qu’il préfère : les repas : « Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n’invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi te rendraient l’invitation et ce serait pour toi un don en retour. Au contraire, quand tu donnes une réception, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ; heureux seras-tu, parce qu’ils n’ont rien à te donner en retour : cela te sera rendu à la résurrection des justes. »
Donc de deux choses l’une : soit nous ne cherchons pas à être heureux, soit nous ne croyons pas Jésus quand il nous dit cela ! Car il faut bien se l’avouer nous faisons le plus souvent ce que Jésus ne nous recommande pas, c’est-à-dire que nous invitons nos connaissances en espérant implicitement qu’elles nous rendent la pareille ! Dans ce cas tout est prévu, on reçoit… alors que dans l’autre la surprise est de chaque instant, on accueille. Sœur Emmanuelle disait que « recevoir procède des usages du monde. Accueillir relève des usages du cœur ».
La clé pour comprendre le raisonnement de Jésus est simple, il veut nous dire que le bonheur ne s’auto-construit pas, qu’il est vain de penser que l’on peut se fabriquer son petit bonheur pour soi ou dans l’entre-soi, il nous dit que c’est un leurre. Faux bonheur clinquant dont ne cesse pourtant de nous faire miroiter la presse people, et tant de publicités sur nos écrans.
C’est souvent ce que je suis amené à dire dans les préparations au mariage d’une façon volontairement provocante : « vous ne vous mariez pas pour être heureux, vous vous mariez pour rendre l’autre heureux ». Le bonheur n’est pas une possession ou une conquête, il est un don reçu ou donné. Le bonheur n’appartient pas à l’un ou à l’autre, il émane, il émerge, il se savoure et se reconnaît dans l’échange et le don de soi. Vivre selon l’évangile consiste à chercher à s’efforcer de faire le bonheur de l’autre. Il faut de l’humilité pour se donner, il en faut aussi pour accueillir. Et même, « il y a souvent plus d’humilité à recevoir qu’à donner, car recevoir, c’est permettre (donner la possibilité) à l’autre de donner » (Burrows).
Le bonheur est la conséquence inattendue de l’engagement, du don humble et désintéressé de soi. Bien sûr cela demande du courage et de la détermination parce dans ce cas-là, il faut décider d’aller de l’avant en naviguant à vue, là où aucun plan de table n’est possible, là où rien n’est programmable ni prévisible. Mais aller de l’avant c’est précisément le sens des béatitudes dans l’évangile de Matthieu qui au lieu de commencer par « heureux » peuvent être traduites par « en avant » (même si « en marche » serait la meilleure traduction, mais depuis 6 ans, on n’ose plus l’employer !). L’évangile des béatitudes nous dit que lorsque l’on est en marche lorsque l’on est audacieux, lorsque l’on quitte sa zone de confort… alors on est bienheureux et l’on a toutes les chances de goûter à un bonheur inattendue mais vrai.
C’est la rentrée pour notre paroisse Saint-Gabriel de Vaise. Peut-être que vous n’avez pas encore dressé un plan de table tout ficelé pour votre année. Alors, si vous voulez être heureux, la paroisse est un lieu où le bonheur peut se déployer en donnant de soi, en recevant des autres, en espérant que chacun d’entre nous désire entrer dans cette réciprocité pour goûter l’amour de Dieu et les béatitudes. Amen.
Chant « Vous serez vraiment grands »