Dimanche des Rameaux B –28 mars 2021
Is 50, 4-7 – Ps 21 (22) – Ph 2, 6-11 – Mc 14, 1 – 15, 47
Homélie du P. Franck Gacogne
S’il y a un seul texte des lettres de Paul que nous devions apprendre par cœur, il faudrait que ce soit celui-ci. Car nous avons bien là toute la révélation de Dieu, ce passage nous décrit le Dieu des chrétiens comme une courbe mathématique. Certain de vous aime les maths ? Si je vous dis y=ax²+bx+c, vous me dites quoi ? Une parabole ! Oui, la foi chrétienne est décrite par une parabole avec ses deux mouvements :
Le premier du haut vers le bas est à l’initiative du Christ Jésus. C’est un mouvement de descente, d’une condition divine supposée riches d’attributs, lointaine, dominatrice ; à une condition de serviteur des hommes, en se faisant homme. « Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur ». Il s’est anéanti. En grec, c’est le mot kénose qui mot à mot veut dire « se vider », « se rendre creux ». Dans ce dépouillement, Jésus demeure intégralement et toujours le Fils de Dieu, mais il descend, il se vide de tous les artifices, de tous les qualificatifs qui étaient habituellement attribués à un Dieu tout-puissant. Maintenant nu, en creux, voilà qu’il peut revêtir la condition humaine, être un homme de son temps. Jésus, dans cet abaissement, va aller plus profond encore « jusqu’à mourir, et à mourir sur une croix ». C’est le point le plus bas, le minimum de la parabole. Il ne pouvait pas descendre plus bas dans la condition humaine que subir l’infamie d’une mort réservée aux criminels… mais quand Dieu se fait homme, il ne veut en oublier aucun. Ce mouvement de descente verticale, nous l’avons tous tracé sur nous tout à l’heure en faisant notre signe de croix. Ce mouvement vient croiser une ligne horizontale, l’horizon de nos vies : le Christ, qui vient surgir dans notre temps qui s’écoule de la gauche vers la droite, il vient prendre ce temps, le vivre, l’assumer, l’aimer.
Le deuxième mouvement que décrit cet hymne de St Paul : c’est une remontée qui cette fois-ci est à l’initiative du Père : « C’est pourquoi Dieu l’a exalté : il l’a doté du Nom qui est au-dessus de tout nom… ». Jésus, Fils de Dieu et vrai homme se voit relevé, attiré par son Père, qui lui donne son Nom, sa vie. Voilà tout à coup que par Jésus nos vies à chacun sont appelées à être en Dieu, à devenir Dieu. L’amour manifesté ainsi jusqu’au bout a engloutis la mort, car Dieu lui donne sa vie. Si Jésus prend la condition des hommes en descendant, c’est pour que nous puissions prendre la condition de Dieu en montant vers Lui. Je ne suis pas sûr que nous ayons, à sa juste mesure, pris conscience combien ce cadeau de Dieu pour l’homme est phénoménal ; il est pourtant exprimé dans la simplicité d’une croix portée en bijou, dans nos maisons, au sommet des montagnes ou à la croisée des chemins…
J’ai la conviction que toute la foi chrétienne se résume par cette courbe que l’on appelle une parabole, qui d’un point haut descendrait jusqu’à un minimum pour remonter. C’est vrai dans le credo que nous réciterons tout à l’heure : […] Jésus-Christ, Fils unique de Dieu, il est Dieu, de même nature que le Père […].Pour nous les hommes, et pour notre salut, il descendit du ciel, il s’est fait homme, il souffrit sa passion et fut mis au tombeau. […] Il ressuscita le troisième jour et il monta au ciel, il est assis à la droite du Père. On retrouve ce même mouvement dans le baptême bien sûr, qui plus est quand il est fait par immersion : plongé dans la mort et la résurrection de Jésus, pour renaître à une vie nouvelle.
Comment être témoin de cette Bonne Nouvelle ? En se rendant capable de descendre jusqu’où le Seigneur lui-même est allé. Jésus est venu les prendre par la main. Et moi, à qui vais-je donner la mienne ? Amen.