Jeudi Saint B – 28 mars 2024
Ex 12, 1-8.11-14 – Ps 115 (116) – 1 Co 11, 23-26 – Jn 13, 1-15
Homélie du Fr. Tuan Nguyen (a.a)
A la Cène, apprendre à espérer en aimant et en croyant
Frères et sœurs,
Contemplons, regardons un Jésus, lumineux et plein d’espérance ! Il l’est car en dépit de ce qui lui allait arriver, Il allait être arrêté, rejeté, condamné et allait être mis à mort, le groupe allait se disperser, il continue d’aimer et à croire. Serait-ce une belle manière d’espérer ?
Aimer et servir
Jésus espère en aimant jusqu’au bout. Partager ce repas avec ses disciples est un signe d’amour et d’affection de Jésus. Le repas est signe de communion, d’amitié, et de partage. Jésus se sert de cette réalité très humaine pour dire quel est son amour pour ses disciples. Cela va plus loin, car Jésus demande à ce que plus tard ses disciples feront ce même repas pour faire mémoire de Lui. Ce que nous, les chrétiens, ferons à l’Eucharistie ou la messe. Ce désir de se donner va encore plus loin, car Jésus veut se donner lui-même comme nourriture et breuvage, c’est-à-dire toute sa personne. Cela ne pourra se comprendre parfaitement qu’après sa résurrection. Chaque fois que les disciples se réunissent, Jésus est présent au milieu d’eux, dans une proximité la plus grande. Jésus fait don de lui-même.
Aimer se traduit par le fait de se mettre au service de ceux qu’on aime. Laver des pieds des disciples est considéré comme étant une action humiliante, parce que c’est un geste réservé aux esclaves. Pour Jésus une façon de dire son affection aux siens.
Laver les pieds de ses disciples résume finalement toute cette mission de Jésus sur terre. Une vie entièrement donnée, par amour : « Le fils de l’homme est venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude ». (Mc 10, 45). Jésus parcourait 3 années durant les villages, les villes pour annoncer la bonne nouvelle de Dieu ; il se penchait sur les personnes plus marginalisés, exclus, pauvres, ceux qui désespéraient, ceux croient qu’ils n’ont rien été, il se mettait à leur service. Jésus se mets aux pieds des disciples. Devant nous aussi, ce soir, Jésus se met à nos pieds et nous demande : voulez-vous aussi avoir part avec moi ? », acceptons-nous d’être invité à sa table dans le Royaume ?
Si Jésus porte un regard plein d’espérance, c’est parce qu’il croit en Dieu, son Père. Il croit aussi à la capacité de l’humanité d’apprendre à espérer en aimant et en croyant.
Une communauté fondée sur l’amour et le service mutuel
Lors de ces derniers instants avec ses disciples, Jésus laissa un message d’espérance. Quoi qu’il arrive, la petite communauté qu’il a établie et fondée sur l’amour et le service mutuel devrait espérer comme le Maître en aimant et en se servant mutuellement.
L’entrée à Jérusalem de Jésus fait voir sa popularité grandissante, Jésus aurait pu susciter un groupe capable de faire quelque chose révolutionnaire. Tel est sans doute l’idée nourrie par certains disciples. Certains auraient espéré que le repas avec le Maître est le moment favorable pour faire quelque chose ! ils ont été déçus ! Dans la comédie musicale Jésus Christ Superstar (1970) d’Andrew Lloyd Webber (musique) et Tim Rice (textes) qui s’intéresse aux derniers jours de la vie de Jésus de Nazareth tels que les relate le Nouveau Testament. Judas Iscariote demande à Jésus d’avoir les pieds sur terre, autrement dit, avoir un plan plus réaliste, la force et la violence si nécessaire ! Il en a assez des idées en l’air sur le paradis ! Eh non, Jésus ne propose pas un tel programme. Il propose une révolution tout autre. Le repas et le lavement des pieds sont des signes forts. « Si moi, le Seigneur et Maître, je vous lavé des pieds, vous aussi, vous devez laver les pieds les uns aux autres » (Jean 13). Un exemple d’amour que Jésus donnait à ses disciples, à leur tour qu’ils fassent de même, réciproquement. C’est ça la révolution que propose Jésus ! Le cardinal vietnamien F.-X NGUYEN Van Thuan, pendant ses 13 années dans la prison communiste, témoigne de l’espérance que l’Eucharistie donnait : « L’Eucharistie te nourrira sur le chemin de l’espérance (voir Jn 6,50), écrit-il. Nourri par cette énergie de l’Eucharistie, il espérait toujours. Ce chrétien et prêtre était emprisonné, mais il vivait librement et généreusement parce qu’il imitait le Christ, parce qu’il puisait sa force de cette espérance qui le poussait à toujours continuer à aimer et à croire. Il croyait que « Jésus sur la croix a commencé une révolution. Votre révolution doit partir de la table eucharistique et de là se propager. C’est ainsi que vous pourrez renouveler l’humanité. » Il n’est pas étonnant que les autorités pénitentiaires craignissent de changer trop souvent des surveillants de peur qu’ils deviennent chrétiens, parce que certains avaient été gagnés par le témoignage de ce prisonnier singulier.
Quand Chaque chrétien, chaque disciple de Jésus sait témoigner de cette espérance, non pas une espérance naïve, mais active, il peut apporter beaucoup dans notre monde qui est dûr. Dans un monde où l’intérêt des individues et de certains groupes priment sur le reste, où le bien commun a disparu, où la violence domine dans bien des endroits. Comme Jésus, il serait toujours bon d’espérer. Au cours de ce dernier repas, Jésus a posé cette base à une communauté des disciples fondée sur l’amour et le service mutuel. L’Eglise doit se souvenir de cela, tel est son être profond.
Rien ne serait pire de vivre sans espérance. Jésus nous apprend à espérer malgré tout. Espérer en aimant et en croyant. Désormais, chaque fois que nous venons à la messe, c’est réapprendre à espérer comme Lui et avec Lui.