27e dimanche du temps ordinaire A – 4 octobre 2020
Is 5, 1-7 – Ps 79 – Ph 4, 6-9 – Mt 21, 33-43
Homélie de Bruno Leborgne (diacre permanent)
Depuis l’entrée messianique à Jérusalem, et les vendeurs que Jésus a chassé du temple, la relation entre Jésus et les dignitaires religieux s’est fortement dégradée. La parabole des vignerons homicides, que nous entendons ce matin, est située dans ce contexte tendu. Jésus vient de leur déclarer, que les collecteurs d’impôts et les prostitués, qui ont cru au témoignage de Jean-Baptiste, les devancent dans le royaume de Dieu. Ce que Jésus reproche aux prêtres et aux anciens du peuples, c’est leur manque d’intelligence des évènements. Avec cette nouvelle parabole, il tente de leur ouvrir les yeux, sur sa personne et sa mission.
Jésus reprend l’image de la vigne que ses interlocuteurs connaissent, mais il adapte l’histoire et change la signification. Dans le livre d’Isaïe, la vigne ne produit pas de fruits. Dans l’évangile la vigne produit des fruits, mais les vignerons refusent, de les remettre au propriétaire. Ils veulent non seulement conserver les fruits, mais aussi s’emparer de la vigne. Ils veulent être les maîtres et les seigneurs du domaine.
C’est un comportement, et une motivation, que nous reconnaissons. Ils sont déjà présents dans le livre de la Genèse. Lorsqu’Adam et Eve refusent, leur obéissance et Dieu, et veulent pour eux-mêmes, être semblable à dieux. En refusant de remettre les fruits de la vigne, en voulant être maîtres et seigneur du domaine, les vignerons de la parabole, ressemblent à nos premiers parents. La parabole des vignerons met en lumière le péché de l’humanité, dans ses racines les plus profondes.
Ce que nous voyons à l’œuvre dans la parabole, c’est un mal qui conduit à un enfermement. Les vignerons sont prisonniers de la violence ; Ils frappent, ils lapident et ils tuent les serviteurs. Ils interprètent la patience, du maître et seigneur de la vigne, non comme un signe de sa puissance, mais comme le signe de sa faiblesse. Et lorsque le propriétaire envoie son fils, lui aussi est tué, victime de leur violence. Les vignerons semblent méconnaître le père. Ils semblent tout ignorer de sa miséricorde. La violence qui les asservie, étouffe dans leur cœur, la certitude d’être aimé, et d’être pardonné.
En n’accueillant pas le message de Jean-Baptiste, qui préparent les cœurs à la miséricorde, les grands prêtres et les anciens du peuple, sont incapables d’envisager un pardon. Et lorsque Jésus leur demande, ce que fera aux vignerons, le maître de la vigne. Ils répondent avec la violence dans laquelle ils sont enfermés : ‘Ces misérables, il les fera périr misérablement.’
Mais il n’en sera pas ainsi ! Dans sa parabole, Jésus ne retient pas, pour les vignerons homicides, cette sentence définitive. La gestion de la vigne, leur est retirée, mais les vignerons homicides, ne meurent pas misérablement. Jésus ne veut pas la mort, mais la conversion des pécheurs. Comme celle des collecteurs d’impôts et des prostitués, qui reconnaissent leur profonde indignité, et accueillent avec reconnaissance, l’amour dont ils sont aimés, et le pardon qui l’accompagne. Malheureusement les grands prêtres, et les plus anciens du peuple, ne sont pas prêts à vivre cette conversion, et à s’ouvrir à l’amour de Jésus pour eux.
Ce que nous voyons également dans cette parabole, c’est la limite qui est imposée au mal. Les vignerons homicides, ne s’empareront pas de la vigne. Au moment où ils pensent, pouvoir s’en emparer, la situation est soudainement retournée, et la gestion de la vigne leur est retirée. C’est le temps du propriétaire, le jour et l’heure de son action. Il renverse la situation, et il rétablit la justice. Sa vigne n’est pas emportée, par la violence et la puissance du mal.
Les vignerons homicides de la parabole, et les dignitaires religieux de l’évangile, ne sont pas les seuls à vivre dans la violence, et le refus d’accueillir le Fils, envoyé par le Père. La société d’aujourd’hui, présente aussi ces symptômes. Elle refuse par principe toute référence à Dieu. Elle bouleverse par des lois éthiques, les notions de bien et de mal. Elle se fait peu à peu comme semblable à Dieu. Et comme les vignerons de la parabole, elle est, elle aussi, entraînée dans une violence, dont elle ne peut se libérer et s’affranchir.
Mais nous savons malgré tout, qu’une limite contre le mal est dressée. La vigne n’est pas tombée au pouvoir des vignerons homicides, la violence n’emportera pas l’humanité dans la mort. Le Christ ressuscité, est vainqueur de la mort. Et là où la tête est passée, le corps à son tour passera. Quand viendra le jour et l’heure que seul connaît le Père, la violence disparaîtra, la mort n’existera plus. Les hommes vivront avec le Christ, dans l’amour qui rayonne du Père. C’est la vocation à laquelle nous sommes tous appelés.
Et chacun d’entre nous, nous pouvons y répondre. Que nous soyons collecteurs d’impôts ou prostitués, grands prêtres ou anciens parmi le peuple, accueillons le message que Jésus nous adresse, et rendons au Père les fruits qui lui reviennent : Les fruits de l’espérance, dans son royaume d’amour qui nous est destiné ; les fruits de la foi, dans l’œuvre de salut, accomplit par le Christ ; les fruits de la patience et de la charité, que l’Esprit saint nous donne de vivre.
Vivons la vie qui nous est donnée, dans la patience et la charité, dans la foi et l’espérance.