Fête de la Pentecôte C – 5 juin 2022
Ac 2, 1-11 – Ps 103 (104) – Rm 8, 8-17 – Jn 14, 15-16.23b-26
Homélie du P. Franck Gacogne
Ce jour-là, onze pauvres types, terrés par peur des juifs, attendent dans une maison, ils ne savent pas trop quoi d’ailleurs. Le Christ leur est bien apparu le soir de Pâques, puis huit jours après pour être vu de Thomas. A chaque fois, il les a réconfortés un moment leur disant : « La paix soit avec vous ! ». Mais il s’en est allé et, depuis dix jours maintenant, il n’a toujours pas donné de nouvelles. Les Apôtres se trouvent terriblement démunis, ils se sentent terriblement incapables, alors que Jésus leur a pourtant donné la mission d’être ses témoins. Heureusement, Marie est avec eux : une présence certainement réconfortante et apaisante dans cette attente.
Soudain, un bruit survint du ciel, un violent coup de vent et des flammes viennent se poser sur leurs têtes. Ils sont tout simplement transformés, métamorphosés, « vitaminés », « revitalisés ». Ils sortent alors vers cette foule bigarrée de la Pentecôte juive, cette foule qui est rassemblée des quatre coins du bassin méditerranéen à l’occasion de la fête. Et eux, les ignares confinés voilà qu’ils proclament les merveilles de Dieu, qu’ils parlent, et que tout le monde les comprend. Eux, qui étaient terrés de peur après la mort de Jésus, voilà qu’ils partent maintenant « mus par l’Esprit » à la rencontre de tous. Quelqu’un a agi, efficacement : le Saint Esprit. Comment pourrait-on mieux définir le Saint-Esprit que cela ? Celui qui donne la force d’être témoin du bonheur qu’il y a de se mettre à la suite de Jésus.
Qu’est ce que l’Esprit Saint fait pour nous aujourd’hui ? Je pense que chacun de nous vit la Pentecôte chaque fois qu’il se sent porté par sa foi à être témoin du Christ qui vit en lui, et à en être témoin comme membre d’un corps c’est-à-dire en Eglise, jamais tout seul, c’est cela être missionnaire. Les adultes qui ont reçu le sacrement de la confirmation hier en étaient une belle manifestation. Mais nous ici dans cette église, nous sommes aussi expression, visibilité de l’Esprit Saint au milieu de nous.
La Pentecôte, c’est l’anti-Babel, c’est Babel à l’envers. Vous savez, à Babel, en confondant le langage des hommes, Dieu avait arrêté leur folle entreprise : celle de vouloir uniformiser tous les hommes pour les asservir au projet démentiel de construire une tour qui monterait jusqu’au ciel. A la Pentecôte, Dieu descend du ciel pour unir. Il ne veut pas l’uniformité des hommes dans une même langue, une même culture, mais il veut que par l’intermédiaire des Apôtres, chacun entende les merveilles de Dieu dans sa propre langue et dans sa propre culture, autrement dit que Dieu soit accessible à toute personne là où elle est, et là où elle en est. Pentecôte, c’est le surgissement, la naissance de l’Eglise, mais en y englobant toute la diversité humaine répandue à travers le monde. Une Eglise aux mille visages. A la Pentecôte, l’Eglise naît d’une façon vraiment universelle, c’est-à-dire que jamais elle ne pourra se réduire à la situation aux préoccupations d’une communauté précise ou même de tout un pays. La Pentecôte, c’est la force et l’audace donné à chacun pour désirer traverser les frontières géographiques mais aussi culturelles, ou tout simplement les barrières qu’on érige devant soi par peur de la rencontre, ou par crainte de la différence.
Alors que ce matin nous accompagnons Isaline, Alba, Calixte, Juliette et Melen, Esprit Saint, insuffle ta force, ta vie, et le feu ardent de ton amour à tous ceux qui croient en toi. Fais de nous tes envoyés. Donne-nous l’audace d’offrir et de dire le bonheur qu’il y a de se savoir infiniment aimé par toi. Donne à chacun de nous de savoir se réjouir de l’autre et de sa différence, que nous puissions aimer et désirer cette complémentarité dans ton Eglise. Apprends-nous à savoir te découvrir et te reconnaître en chacun de nos frères humains parmi lesquels tu as fait ta demeure. Amen.