Open/Close Menu Paroisse catholique à Lyon

Mercredi des Cendres – 5 mars 2025

Jl 2, 12-18 – Ps 50 3-4, 5-6ab, 12-13, 14.17 – 2 Co 5, 20-6, 2 – Mt 6, 1-6, 16-18

Homélie de Éric de Nattes

Joël : « Déchire ton cœur et non tes vêtements »

Le message est clair : « Arrête les indignations faciles, superficielles celles qui ne te coûtent rien et qui ne t’engagent à rien ». C’est du mauvais théâtre ! « Tu as touché ta récompense », te dit Jésus. Le bien ne fait pas de bruit, tu le sais. Alors que ton indignation (car il y a de quoi en avoir !) t’engage réellement. Pour le reste, ce ne sont que des mondanités sous le regard des hommes qui tantôt te loueront, tantôt te moqueront. Toi, surveille tes paroles, mets-les en adéquation avec des actes. Ne te paie pas de mots !

« Déchire ton cœur ! »

« Le Cœur », c’est le mot biblique. On peut parler d’âme, de conscience… la réalité est la même. François parle du cœur profond. Descends en toi, le plus profondément possible, le plus loin ! Je cite Madeleine Delbrêl : « Si tu vas au bout du monde, tu trouveras la trace de Dieu. Si tu vas au bout de toi, tu trouveras Dieu. » Ou Saint Augustin : « je l’ai cherché au dehors, Il était au dedans. ». Au cœur de ton désir éparpillé, blessé, cadenassé par la peur d’être touché par l’autre, tu le trouveras LUI ! Il te cherche (c’est sa première question à Adam dans la Genèse : « où es-tu ?’ Je n’ai plus accès à ton cœur). Il frappe à la porte, te dit l’Apocalypse. Il veut demeurer avec toi. Parce qu’avec Lui tu pourras répondre à l’appel qu’il lance à Abraham, c’est-à-dire à tous les croyants : « Quitte ton pays et va vers la terre que je te donne en héritage », ou selon le jeu de mots propre à l’hébreux : « Va vers toi ». Mais pour ce pèlerinage intérieur, celui d’une vie entière – aller ver soi – devenir la personne que je suis appelé à devenir, il me faut aller demeurer là où Lui se tient aussi et m’attend pour m’aider à grandir : au cœur. N’est-ce pas la raison pour laquelle l’invitation à la prière aujourd’hui, se traduit ainsi : « pour toi, quand tu pries, retire-toi dans la pièce la plus retirée : ton Père est là ! »

 Prie, jeûne et fais l’aumône.

Prie : Prie. Entre en toi, pour y rencontrer le Père. Là où il fait jaillir en toi comme en chacun la vie qui ne meurt pas. On ne te demande pas d’avoir des pensées sublimes ! On ne te demande pas de te passer au crible de la morale pour voir si tu coches bien toutes les cases de la mise en conformité ! On ne te demande pas de réciter et de rabâcher ! On t’invite d’abord à te laisser aimer pour ouvrir ton cœur et entrer dans le dialogue. Dire qui tu es en cet instant. N’oublie jamais sa première question à l’humain : « Où es-tu ? » Laisse-moi te trouver. Alors les larmes de repentir ou de joie pourront venir, et les actes suivront car il te transformera. Mais laisse-toi trouver par Lui, il frappe à ta porte.

Jeûne : Dessaisis-toi ! Simplifie-toi ! Rends-toi libre, même de ce dont tu crois ne pas pouvoir te passer ! Débarrasse-toi des apparences ! Sérieusement – souviens-toi ! – lorsque tu étais amoureux, alors que ton cœur était tout habité de la présence de l’autre, ton problème était-il de savoir ce que tu allais manger, comment tu allais t’habiller. Le souci de toi était-il ce qui t’animait ? Non, tu ne réalisais même pas à quel point tu étais libre du regard des autres, puisque tout habité de son regard ! Tu ne craignais pas l’avenir puisqu’il était en sa compagnie. Alors jeûne volontiers de tout ce qui t’occupe sans te donner de joie véritable, pour revenir vers Lui. Il désire refaire alliance avec toi. Vivre la pâque au désert. Il aimerait tant que tu aies faim de Lui. Il se ferait alors nourriture pour toi.

Fais l’aumône : Pas à la manière d’une dame patronnesse qui se penche sur la misère du monde du haut de ce qu’elle pense être sa richesse ! Car tu le sais, tu es, toi aussi, un mendiant (d’amour, de vie vivante, de reconnaissance, de bienveillance) mais un mendiant qui a juste le privilège, pour l’instant, de pouvoir couvrir sa pauvreté devant le regard de l’autre par quelques richesses. Alors sois généreux de toi dans ce que tu partages. Par les choses que l’on donne, on ne se donne que soi-même en fin de compte. Rappelle-t-en avec ton époux(se), tes enfants, tes proches, tes collaborateurs. Que ton aumône ne soit pas ‘télescopique’ pour ceux que tu ne vois pas, qui sont au loin – le pauvre à l’autre bout du monde -, mais d’abord pour celles et ceux dont la présence à tes côtés, éprouve ta charité. « Ton Père est là, au plus secret – dans ton cœur – il voit, il t’a trouvé, tu Lui as ouvert la porte, Il te le rendra » puisque désormais Il peut être avec toi.

Amen