2ème dimanche de l’Avent – 8 décembre 2024
Ba 5, 1-9 – Ps 125 (126)1-2ab, 2cd-3, 4-5, 6 – Ph 1, 4-6.8-11 – Lc 3, 1-6
Homélie de Éric de Nattes
Toute chair verra le salut de Dieu
« La Parole de Dieu fut adressée à Jean ». Un prophète est né ! Ainsi, lorsque la Parole retentit de manière personnelle dans le cœur, dans l’esprit, dans la vie d’une personne, lorsque je ressens que cette Parole m’est adressée, à moi, et qu’elle modifie, qu’elle change, voire qu’elle bouleverse mon existence, alors, nait un prophète. J’aime à souligner cette ‘adresse’ personnelle de la Parole de Dieu à chacun, puisque le baptême fait de nous des prophètes. Et le prophète, avant de porter la parole vers les autres, selon l’étymologie du mot, que la Parole devient une mission et pas seulement une vocation, un appel, le prophète est donc celui qui a l’intuition, qui ressent au plus profond de lui que cette parole lui est adressée. Que cette parole inaugure une relation qui l’engage. Avant de prêcher un baptême de conversion, la Parole a converti d’abord le cœur de Jean. Parce que Jean a été déplacé par cette Parole, alors d’autres se déplaceront.
L’œuvre de Dieu, son action commence toujours dans ce lieu le plus intime, le moins public, le plus caché, qu’est le cœur de l’homme, ou son âme, ou sa conscience, donnez le nom qui vous parle. Si l’enfant a tressailli dans le sein maternel, alors que la Parole prenait chair en Marie, l’adulte désormais retrouve ce tressaillement intérieur en s’éloignant des lieux du culte officiel. Une fois encore, Luc utilise cet effet saisissant où l’on passe de l’empire, aux provinces romaines et régions païennes autour de Jérusalem, puis au Temple lui-même avec l’évocation des grands prêtres, pour finir dans le désert, là où le cœur d’un homme s’est laissé saisir par la Parole.
Frères et sœurs, peuple de prophètes par le baptême, informez-vous de ce qui se passe dans le monde, soyez vigilants et regardez ce que font les grands de ce monde, investissez avec cœur et générosité les responsabilités qui sont les vôtres, mais ne perdez jamais courage ! Que votre cœur se mette aussi – avant tout ? – à l’écoute de la Parole de vie en vous, au plus intime, et agissez en conséquence. Au cœur de la grande histoire, celle qui nous fascine, qui nous fait peur, qui nous inquiète, devant laquelle nous nous sentons souvent tellement impuissants, une autre puissance agit, différemment, hors de l’apparence et de l’éclat, au plus près de la vie réelle, là où chacun de nous se donne, vit, travaille, aime. Frères et sœurs, peuple de prophètes, nous cheminons vers Noël : un homme, une femme enceinte, un couple pris dans la tourmente de la grande histoire, mais portant la vie : Dieu est là.
Il est intéressant, de constater, dans ce grand portique que Luc nous livre, que les 7 noms égrainés – plus on se rapproche de Jérusalem d’ailleurs avec Caïphe – seront tous, à leur manière, des obstacles à la Parole. Jean sera décapité et Jésus crucifié. Et que pourtant, la Parole se fera entendre à Rome comme dans les provinces païennes, comme à Jérusalem. Elle est porteuse d’une force qui est d’une autre nature. « Mes paroles ne passeront pas ». Nous en sommes les relais. Elle est-ce cavalier blanc de l’Apocalypse que les puissances destructrices de ce monde ne parviennent pas à arrêter.
Alors, frères et sœurs, prophètes par le baptême, n’est-il pas temps d’entendre l’appel à la conversion, à chasser ce qui fait obstacle à la Parole en chacun de nous, pour qu’elle nous soit à nouveau ‘adressée’, personnellement, de cœur à cœur.
- Me retirer un peu hors de l’agitation de mon esprit, dans le désert intérieur.
- Quels sont mes sentiers tortueux ? Là où je complique tout dans mes relations ?
- Quels sont les ravins qui m’interdisent de rejoindre l’autre, me privant ainsi de sa présence et le privant de la mienne ?
- Quelles sont les montagnes que j’élève pour ne jamais engager un premier pas ?
- Quels sont les cailloux que je fixe pour ne plus voir le chemin que je pourrais emprunter ?
Préparer les chemins du Seigneur, en vue du pardon ! Mais nous savons, nous, que ce pardon nous a été donné dans le baptême selon l’Esprit Saint. C’est le grand jubilé annoncé par Jésus au début de sa prédication. Le salut donné à tout vivant : espérance en Isaïe ; réalisé en Jésus. Alors, est-ce que je vis comme quelqu’un de pardonné et de sauvé ? Ce qui m’est donné, comment je me dispose vraiment à l’accueillir ? Vraiment ?
Allez, frères et sœurs prophètes, pour que Noël ne soit pas juste une belle fête familiale, mais celle de la Parole qui se fait chair, tellement proche, préparons nos cœurs, ouvrons- les, écoutons la vie qui nous parle !